Il y a sur wikipédia comme sur d’autres sites Internet une inscription qui me pose question : « pour citer correctement la source copiez ce texte ». Il suffit effectivement d’un copier coller pour avoir le texte « normalisé » de la citation. Ainsi l’étudiant en mal de respect du droit d’auteur se fera un devoir d’effectuer ce simple copier coller (pour peu que son enseignant y soit réellement sensible) et ainsi de s’assurer l’estime de son correcteur. Nos amis juristes ont certes raison d’imposer cette règle mais peut-êre faut-il aller voir de plus près ce que signifie « citer un auteur » dans l’esprit de celui qui le fait. On reproche aux jeunes d’aimer copier, désormais on peut aussi dire plagier (cela fait mieux). Alors on leur demande au moins de citer ce qu’ils copient que l’on puisse distinguer ce qui est d’eux et ce qui ne l’est pas. Parfois même par excès de zèle certains donnent des sources de documents qu’ils n’ont même pas copié et dont ils se sont à peine inspiré, voire pas du tout.
Car le fond du problème est, à mon avis, bien davantage dans ce que signifie « citer ». La suspicion du plagiat vient du fait que l’on subodore que le travail écrit ne soit pas le reflet d’un « travail intellectuel » de celui qui le transmets au correcteur. Afin d’éduquer celui qui fait cela on pense qu’il faut lui apprendre à citer ses sources. On pense ainsi que l’on fera la part du travail intellectuel de celui qui écrit. Malheureusement, cela me semble bien léger en regard du véritable enjeu de la copie : la compréhension.
Ce que l’on cherche à évaluer dans un travail intellectuel, c’est bien cette construction mentale qui résulte de toute une démarche et qui aboutit à cette production. Or ce travail mental repose sur le rassemblement de ressources pertinentes (externes ou internes, reprises, apprises ou crées) qui vont ensuite être assemblées dans le produit final. Le choix d’une ressource, son intégration dans le produit, son articulation avec les autres ressources sont autant d’éléments du travail mental qui supposent d’abord la « compréhension » autrement dit le « prendre avec » qui suppose une relation complexe à la ressource. Ce qu’Internet, à l’instar de tout support numérique, amène comme questionnement c’est que cette relation à la ressource peut être très mince, très éphémère, voire inconsciente (j’ai cliqué sans m’en rendre compte) et surtout pas complexe. Dès lors on se rend compte que le seul fait de citer la source ne suffit pas à évaluer la pertinence du choix, mais simplement le respect du droit.
C’est de citer dont il faut s’occuper vraiment. Autrement se contenter de mettre un renvoi à un livre voire au nom de l’auteur lorsqu’on veut y faire référence, ne permet pas de juger la pertinence de ce lien, c’est même parfois simplement un acte d’allégeance. De même l’extraction de phrases sorties de leurs contexte, accompagnées de la référence ne suffit pas. Citer un auteur, citer un texte, c’est d’abord intégrer une pensée « autre » dans sa « démarche de pensée ». Cela suppose donc un travail important sur ce qui amène à « utiliser » l’autre dans son propre travail. Le risque serait, si l’on est pas vigilant, d’utiliser ce fameux copier coller de la référence de la source sans se préoccuper de ce à quoi elle renvoie réellement, ou d’extraire sans discernement des passages et de citer la source sans respecter le contexte d’élaboration de ce passage.
Ainsi les aides à la citation des sources, ou l’éducation à la citation des sources ne suffisent pas, il faut remettre le vrai problème au devant des préoccupations : que signifie pour moi, l’utilisation de tel ou tel aspect de la pensée d’un autre. On me reprochera d’ajouter de la procédure à un réflexe qui est pourtant déjà méritoire lorsqu’il est installé. Je retournerai que si cela devient un réflexe on aura perdu le sens véritable de ce qu’est l’emprunt de la pensée de l’autre comme ressource pour ma pensée.
Il serait dommage qu’Internet et certains procédés techniques viennent à mettre l’accent sur la forme alors qu’il me semble fondamental de « comprendre » pour intégrer. Rappelons nous ce délicieux petit ouvrage présenté précédemment sur ce blog : « comment parler des livres que l’on a pas lus » qui dans un autre genre nous appelait certes à de la modestie, mais n’enlevait rien à cette exigence de rigueur.
A débattre, bien sûr
BD"
Aux hasards de mes pérégrinations je trouve souvent des sites pouvant intéresser les profs sans qu'ils aient pour thème la techno. Je les déposerai dorénavant ici. Vous les lirez peut être. Vous les commenterez si ça vous tante. Libre à vous. JMR
dimanche 19 juillet 2009
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